“Carburant bloqué, pays paralysé”
Port-au-Prince, jeudi 15 mai 2025 – Le transport des produits pétroliers en Haïti revêt une importance stratégique, non seulement pour l’approvisionnement énergétique du pays, mais aussi pour la continuité des activités économiques. Dans ce contexte, l’insécurité généralisée, notamment à travers le contrôle exercé par des gangs armés sur les axes de transport entrant et sortant de Port-au-Prince, a des répercussions majeures sur les coûts et la logistique de ce secteur. L’Association des professionnels du pétrole (APPE) a récemment tiré la sonnette d’alarme sur cette situation auprès du gouvernement, révélant les enjeux critiques auxquels le pays fait face.

Les défis du transport pétrolier en Haïti
Le transport des produits pétroliers en Haïti dépend principalement de réseaux routiers vulnérables qui relient les ports de déchargement aux dépôts et aux stations-service. La plupart des produits pétroliers arrivent par voie maritime à Port-au-Prince, mais la distribution des carburants dans l’ensemble du pays est entravée par des routes mal entretenues et, surtout, par le contrôle des gangs qui prélèvent des péages illégaux ou menacent d’attaques.
Coûts cachés et risques liés à l’insécurité
Les gangs armés exercent un contrôle significatif sur les routes d’approvisionnement, augmentant considérablement les coûts logistiques. Voici quelques aspects de ce phénomène :
Frais supplémentaires de sécurité : Les entreprises sont obligées d’engager des services de sécurité privés pour escorter les convois de carburant. Ces frais peuvent représenter jusqu’à 20-30% du coût total du transport.
Pertes dues aux perturbations : Les retards causés par des enlèvements ou des barrages peuvent entraîner des frais additionnels liés à l’inefficacité opérationnelle, allant de la gestion des stocks à la perte de clients due aux pénuries.
Assurances plus coûteuses : Les compagnies d’assurance augmentent les primes pour couvrir les risques associés au transport de produits pétroliers à travers des zones à haut risque. Cela s’ajoute aux coûts déjà élevés pour les entreprises, rendant l’accès à l’énergie encore plus cher pour les consommateurs.
Coûts de Transport directs
Le coût global du transport pétrolier peut être scindé en plusieurs catégories :
Transport maritime : Les frais pour le transport par mer varient en fonction du type de navire, de la distance parcourue et du niveau de risque. En moyenne, les coûts maritimes augmentent de 10-15% dans le contexte actuel d’insécurité.
Transport routier : Le coût du transport par camion est directement affecté par l’augmentation des frais de sécurité. Un trajet qui devait au départ coûter 1 500 dollars peut facilement atteindre 2 000 dollars, voire plus, lorsque la sécurité est prise en compte.
Dépôts et manutentions : Les frais de manutention dans les dépôts et les coûts de stockage ajoutent encore à cette facture. Les entreprises doivent également gérer les coûts de rotation des stocks en raison des interruptions fréquentes.
Coûts indirects pour l’économie haïtienne
Les répercussions de cette insécurité dépassent largement le secteur pétrolier :
Prix à la pompe : Les coûts logistiques croissants se traduisent par des prix plus élevés pour les consommateurs. Le carburant vendu en Haïti est souvent plus cher que dans d’autres pays de la Caraïbe.
Impact macroéconomique : Les entreprises répercutent les hausses de coûts sur les consommateurs, provoquant une baisse de la demande globale. Cela réduit le pouvoir d’achat et entraîne un ralentissement des activités économiques.
Face à cette situation critique, une question centrale se pose : dans quelle mesure l’État haïtien devrait-il collaborer avec le secteur privé pour sécuriser les transports de carburant ?